Naviguer à bord d’un yacht se pratique dans des espaces naturels exceptionnels, souvent préservés, mais la location d’un superyacht et le respect de l’environnement ne semblent pas toujours aller de pair. Les chantiers navals tentent de faire évoluer l’industrie vers un avenir plus vert en proposant des yachts plus éco-responsables, moins gourmands en énergie fossile, plus légers et conçus avec des matériaux plus écologiques et durables.
Aujourd’hui il ne fait aucun doute qu’une nouvelle tendance plus « verte » se dessine et que l’ensemble du secteur du nautisme devra suivre. Rendre le yachting plus durable est un projet qui implique tous les acteurs du secteur des chantiers navals aux compagnies de charter, les équipages et enfin les passagers.
Voyons comment chacun envisage de modifier la façon dont nos yachts interagissent avec notre environnement.
The Sustainable Yachting Network : une fondation du Prince Albert pour un yachting plus vert
La Fondation Prince Albert II de Monaco est une initiative visant à promouvoir le développement d’un yachting écologique. En 2019, la fondation a lancé le Sustainable Yachting Network, qui soutient et fait grandir un réseau de parties prenantes et d’experts engagés dans l’industrie du yachting afin de promouvoir le développement de solutions durables.
Les principaux domaines d’action du Sustainable Yachting Network, et de ses partenaires tels que le Yacht Club de Monaco, le Monaco Yacht Show, le Cluster Yachting Monaco, sont l’organisation d’événements, la production d’outils informatifs comme le guide Best Practices for an Eco-Friendly Yachting, et le soutien à des projets de R&D qui favorisent l’innovation de solutions durables liées au yachting.
Même type d’initiative avec la Water Revolution Foundation, créée lors du Superyacht Forum en 2018 par un petit groupe de leaders du secteur des superyachts partageant les mêmes idées. Elle favorise la collaboration entre plusieurs grands constructeurs navals (dont Benetti, Feadship, Heesen et Lürssen, pour n’en citer que quelques-uns), des entreprises technologiques, des cabinets de design et d’autres associés à l’industrie du yachting. Cette organisation non lucrative agit pour l’innovation et fournit des outils, des évaluations, une expertise et des conseils aux entreprises qui cherchent à avoir un impact positif sur la planète.
Propulsion verte : la course aux énergies renouvelables sur les yachts a déjà commencé
Des innovations technologiques majeures sont réalisées pour promouvoir un yachting plus écologique.
La propulsion est l’une des principales sources de pollution des yachts, notamment des motoryachts. L’un des axes de travail de l’industrie est donc d’investir et de rechercher de nouvelles façons de propulser les navires qui permettraient à la fois de protéger l’atmosphère et le fond des océans tout en conservant, voire en améliorant les performances des moteurs à carburant dont nous disposons aujourd’hui.
De nombreuses solutions sont alors explorées, notamment les systèmes à hydrogène, comme sur le superyacht Aqua de Sinot Yacht ou l’AQUON One, les moteurs électriques, les yachts capables de convertir l’énergie solaire et éolienne en énergie renouvelable, les biocarburants, comme le GTL et le HVO, et les yachts hybrides. Les espoirs d’un avenir plus vert pour le yachting sont grands.
Alors que le marché des yachts hybrides est déjà présent et arrive à maturité, de nombreux chantiers navals traditionnels explorent la possibilité d’ajouter à leurs gammes actuelles/futures gammes une propulsion électrique nécessitant moins ou pas du tout de combustibles fossiles.
Aquon One : les promesses de la propulsion à hydrogène
L’AQUON One est un catamaran à moteur qui peut nous donner un aperçu de ce que peut être notre avenir. Le yacht est un navire vert de 18 mètres de long propulsé à l’hydrogène grâce à une technologie unique développée par Swiss Sustainable Yachts.
Des panneaux photovoltaïques installés sur le toit du bateau convertissent l’énergie solaire en électricité, qui est utilisée pour les moteurs électriques et les équipements à bord. L’électricité peut être stockée dans de petites batteries Li-ion pour une utilisation à court terme et quasi immédiate, tandis que le surplus d’électricité est utilisé pour transformer l’eau de mer dessalée en hydrogène vert (H2). Ce gaz est comprimé à 300 bars et stocké, à long terme, dans des réservoirs en carbone léger. Ensuite, des piles à combustible permettent de retransformer l’hydrogène en électricité, qui peut alimenter les moteurs et équipements électriques du bateau.
Le yacht est autosuffisant, autonome, avec une vitesse de croisière de 8 nœuds, une vitesse maximale de 16 nœuds, et une capacité de 10 personnes à bord.
La croisière sur l’Aquon one est non seulement sans émission mais aussi silencieuse, ce qui réduit la pollution sonore pour l’environnement marin et offre un confort supplémentaire aux personnes à bord.
L’avenir proche des yachts hybrides
D’autres chantiers navals prévoient une évolution rapide au cours des prochaines décennies. Feadship veut n’utiliser que de l’énergie hybride ou être électrique avant 2025, tandis qu’Oceanco veut n’utiliser que de l’électricité.
100% d’énergie renouvelable et produire zéro déchet d’ici 2030. Les équipes de NEEL-TRIMARANS se sont également engagées dès 2018 à développer un type de navigation plus écologique. Ils innovent en permanence pour intégrer des énergies renouvelables sur leur yacht. Le Neel 51, lancé en 2018, est leur premier yacht à marquer une révolution dans l’industrie du yachting avec son moteur hybride. Le Leen 72 va encore plus loin avec son moteur hybride, son panneau solaire à bord et son design ergonomique.
Conception écologique : une étape importante pour les futurs yachts durables
Outre les propulsions, les ingénieurs de l’ensemble de l’industrie du yachting tentent également de développer des conceptions qui aideront les yachts à devenir plus respectueux de leur environnement et plus économes en ressources.
Les conceptions qui réduisent les frottements entre la ou les coques, l’air et l’eau sont donc particulièrement recherchées car elles permettent de réduire la consommation de combustibles fossiles tout en améliorant les performances globales du bateau.
Le poids du yacht revêt également une grande importance et constitue une priorité pour tous les chantiers navals qui se dirigent vers un avenir plus vert. Une part importante de la recherche est investie dans la découverte de nouveaux matériaux plus légers et plus aérodynamiques. C’est pourquoi plusieurs leaders du secteur ont déjà choisi l’aluminium plutôt que l’acier ou la fibre de carbone pour leurs yachts phares.
Le Black Pearl : un yacht futuriste au design écologique
En 2016, Oceanco a lancé Black Pearl, le plus grand voilier DynaRig, mesurant 106,7 mètres, jamais construit dans le monde. Sa coque en acier, sa superstructure en aluminium et ses mâts en fibre de carbone en font un yacht léger malgré sa taille.
Grâce à ses technologies régénératrices, ce trois-mâts peut traverser l’océan Atlantique sans utiliser une seule goutte de combustible fossile. Son système repose sur l’utilisation de la vitesse du yacht sous voile pour produire de l’électricité à l’aide d’une hélice à pas variable.
Dans des conditions normales de navigation, le taux de rotation de l’arbre est réduit. Il peut également être maintenu dans le seul but de récupérer l’énergie cinétique pour la stocker ou l’utiliser à bord, grâce à un moteur électrique de propulsion à aimant permanent.
Black Pearl dispose également de technologies de récupération de la chaleur résiduelle et de batteries de stockage afin de ne pas perdre l’énergie générée et captée.
Les matières premières dans le yachting : un accent sur les alternatives durables
Les matières premières jouent un rôle crucial pour rendre un yacht plus durable et la question doit être analysée sur l’ensemble du cycle de production et de vie du yacht.
Choisir des matériaux éco-responsables, c’est opter pour ceux dont la production est, bien sûr, respectueuse de l’environnement, mais nécessite également une utilisation limitée des ressources dans le processus de fabrication. Certaines fibres végétales comme le lin, le bambou ou le chanvre sont souvent produites de manière éthique, durables, recyclables. Elles sont utilisées pour le linge de maison, les rideaux et l’ameublement, mais le lin et le basalte peuvent également être transformés en matériaux composites comme la fibre de lin ou de basalte. Ces composites verts sont ensuite utilisés dans la fabrication de yachts pour la production de coques, de superstructures et de meubles. Dans d’autres cas, certains matériaux tels que le teck birman labellisé sont simplement remplacés par des platelages en liège provenant de bouchons recyclés pour les sols extérieurs et intérieurs des bateaux.
Le recyclage de vieux matériaux et l’utilisation de matériaux qui peuvent être encore plus recyclés sont également des éléments importants pour rendre l’industrie plus verte. Le chantier naval Benetti explique que : « lorsque nous pensons à un yacht écologique, nous devons le considérer dans son cycle de vie complet, et c’est pourquoi nous avons une stratégie à long terme pour faire en sorte que de nombreuses parties des yachts que nous produisons puissent être facilement démontées et recyclées lorsqu’elles sont mises hors service« .
Bien que cela puisse sembler contre-intuitif au premier abord, certains matériaux synthétiques peuvent également remplacer les matériaux naturels et rendre l’ameublement réellement plus écologique. Si leur processus de fabrication n’est pas toujours le plus écologique, certains d’entre eux restent plus durables dans le temps et ne nécessitent que peu ou pas d’entretien par rapport à leurs homologues naturels. Le cuir animal peut par exemple être remplacé par des matériaux synthétiques recyclés pour un impact environnemental positif et une grande résistance à l’humidité et au sel.
Gestion des déchets à bord : une responsabilité collective pour des océans plus propres
Offrir un avenir plus vert à nos océans passe aussi par une gestion attentive des ressources à bord et notamment des déchets.
Les yachts sont souvent équipés de réservoirs d’eau claire et certains bateaux éco-responsables sont même équipés de systèmes de filtration d’eau potable afin que les plaisanciers puissent profiter d’une eau claire à volonté à bord tout en évitant les déchets et l’utilisation de bouteilles à usage unique.
D’autres systèmes visant à limiter la quantité de déchets rejetés en mer sont également développés, comme celui qui collecte les microplastiques des machines à laver.
Depuis 1986, le mouillage est réglementé dans les eaux européennes, notamment en Méditerranée. La tendance est observée dans le monde entier, où les bouées d’amarrage remplacent l’ancrage afin de réduire les dommages causés à la faune et à la flore, notamment aux récifs coralliens. Dans certaines zones, au Galapagos par exemple l’usage d’écran solaire respectueux de l’environnement est obligatoire.
Par ailleurs, les équipages des yachts et les société de management sont formés aux bonnes pratiques de yachtisme durable. Cela passe par adapter les itinéraires qui respecteront les zones protégées, opter à bord pour des produits d’entretien écologiques comme les détergents, le savon à vaisselle et autres nettoyants écologiques. Un équipage formé vous aidera également à choisir des produits d’hygiène verts, comme des pains de savon et de shampoing pour vos vacances en voilier, ou vous encouragera à choisir des crèmes solaires sans danger pour les récifs, des lingettes nettoyantes lavables et réutilisables.
L’utilisation de produits alimentaires locaux plutôt qu’importés, de saison et biologiques s’inscrit également dans cette même démarche écologique.
Chaque année, de plus en plus de chantiers navals se joignent à la course pour rendre leurs lignes plus écologiques, tandis que les pionniers du yachting durable investissent massivement dans la R&D pour être à l’avant-garde de cette nouvelle façon d’aborder la navigation.
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